« Everything you can imagine is real. »

Si comme moi, vous préférez oublier ce mois de juin tout pourri plein de flotte (sans déconner, en ce moment on devrait courir dans les champs sous le soleil à oilp en chantant L’air du vent et en parlant aux cailloux), j’ai un bon plan lecture. Jeudi, j’ai dévoré Sitrinjêta, un space-opera de Christian Léourier édité chez Critic, que je remercie encore pour la découverte !

(Je propose de faire de cette couv’ une tapisserie pour ma chambre. Qui se dévoue ? Je suis pas manuelle.)

Dans un univers très très lointain où les humains font figure d’espèce négligeable parmi une multitude d’êtres pensants, le capitaine Hénar Log Korson décide de rencontrer le puissant trafiquant Skāatlin afin de mettre la main sur un vaisseau. S’il le cache à l’ensemble de son équipage et à la passagère cryogénisée que Skāatlin a tenu à lui coller, Hénar a une idée très précise de la destination du Snekkja, l’antiquité qui les transporte dans l’espace. Entre les conflits politiques, les courses-poursuite et les manoeuvres potentiellement mortelles au coeur de l’espace, le voyage s’avère plus compliqué que prévu. Et si, en dépit du secret, notre cher capitaine ne maitrisait plus son odyssée ?

Je m’attendais à un roman d’aventure pur et dur, et puis en fait… Pas du tout. Ou presque pas du tout. J’ai été un peu surprise de trouver des retours de lecture mettant surtout en relief le côté fun et entertainment de ce roman, parce que, perso, j’ai trouvé que l’aventure dans Sitrinjêta était un véritable écran de fumée, qui quand il se dévoile, laisse place au coeur du roman, à savoir une sublime ode à l’imaginaire.

Surtout, ne vous laissez pas avoir par la modeste épaisseur du bouquin. En quelques pages, et c’est là que j’ai découvert la force de frappe de Christian Léourier, l’auteur nous brosse l’idée d’un univers infini et ultra cohérent, où une multitude d’êtres pensants co-existent souvent dans la douleur. Des genres de poulpes, des métamorphes, des Kongloïm, des Heerin (peur)… Et presque tout en bas de la chaîne alimentaire, et c’est la beauté de l’affaire, l’Homme, cet être inférieur et méprisable incapable de se maitriser. Rien que ça, ça vous pose un cadre pas banal. Tout ce petit monde évolue au coeur des étoiles, sur des planètes hostiles ou confiné dans des vaisseaux aux trajectoires de montagne russe. J’ai adoré le décor de cette histoire, cet espace fascinant où toutes les aberrations physiques et métaphysiques deviennent possibles.

Pourtant, ça n’a pas été une mince affaire d’entrer dans ce roman. Parce que l’auteur, et je lui en sais gré finalement, nous épargne tout didactisme et se lance cash dans le jargon du pilotage, des espèces extra-terrestres chelous et des phénomènes de l’espace. Tout se met en place assez rapidement, mais ce n’est pas le genre de livre que je lirais dans le bus quoi. (« C’est qui/quoi lui, déjà ? »)

A bord du Snekkja, un chouette tas de ferraille vintage, il est vrai qu’on embarque pour la méga aventure. Hénar est un personnage intéressant, une tête brûlée prêt à tout pour mener sa mystérieuse quête à bien et le trio qu’il forme avec son acolyte Svaun qui a érigé le pilotage au rang d’art et la fière Ullinn fonctionne bien. Le mystère qui entoure la quête d’Hénar et qui est savamment dévoilé au bout de moult et moult pages, les courses-poursuite, les intrus qui tentent malgré eux ou pas de faire obstacle à l’expédition sont autant d’éléments qui rendent cette histoire palpitante.

Mais il n’est pas nécessaire d’attendre la fin, cette belle apothéose, pour se rendre compte que Sitrinjêta, c’est autre chose. De jolies réflexions sur la place de l’homme, sur sa nature belliqueuse jalonnent le roman, jetées ici et là avec une naïveté feinte. Et puis surtout le pouvoir infini de l’imaginaire est au centre de l’écriture et du récit de Christian Léourier, et c’est ce qui fait toute la différence. Le brouillard qui se dissipe.

 

Christian Léourier, Sitrinjêta, Critic. 

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