The Revenant

Alors non, il ne sera ni question de Leonardo Dicaprio en mode cracra ni de chasse à l’ours mais on parlera bien vengeance en ce lundi 28 novembre avec La Vallée des Ombres de Xavier-Marie Bonnot, un roman noir que j’ai eu le plaisir de découvrir ce mois-ci. Un grand merci aux éditions Belfond pour cette lecture !

René Vasseur a quitté la vallée de la Romanche, près de Grenoble, il y a de cela une vingtaine d’années pour servir dans la légion étrangère. Ce qu’il voulait fuir, c’était un village ouvrier étouffant, un père syndicaliste incapable de lui témoigner le moindre signe d’affection mais surtout le souvenir de la mort de son frère, assassiné pendant les grèves de 1986. Aujourd’hui, René est de retour. Est-il simplement venu soutenir son père rongé par la maladie dans les dernières heures de sa vie, ou a t-il de plus sombres desseins en tête ?

Le titre pouvait être difficilement mieux choisi tant les ombres constituent le fil directeur de ce roman très sombre. Ombres des montagnes, du passé, des secrets, du coeur des âmes qui demeurent encaissées dans la vallée… L’essentiel de l’intrigue va s’attacher à les dissiper, petit à petit.

René Vasseur, ce type mystérieux qui a servi dans la légion étrangère est de retour dans son village natal afin d’être présent aux côtés de son père dans ses derniers instants. Le gosse chétif toujours fourré dans les jupes de sa mère, méprisé par le géniteur qui lui préférait son ainé aux idées révolutionnaires, a bien changé. Celui qui a été le témoin silencieux du meurtre de son frère a fait la guerre, a même été décoré. Et l’on devine bien vite qu’il est décidé à retrouver les responsables, qui qu’ils soient, et à les faire payer. Ce qui est particulièrement intéressant, c’est qu’en dépit d’une narration à la première personne, René demeure particulièrement opaque. Jusqu’à la fin, on doute des intentions, du passé de cet homme qui a voulu prouver sa valeur, et qui n’en a visiblement pas fini…

Au-delà de cette histoire de vengeance, il y a une grande dimension sociale dans cette histoire. Contrastant avec la beauté de ses paysages, la vallée de la Romanche abrite une usine métallurgique, véritable coeur d’un village desséché qui connaitra notamment en vingt ans de multiples crises économiques et la montée du front national. Très engagé dans le mouvement syndical, le père a mené une autre forme de guerre, de celles que René n’a jamais su comprendre, du moins jusqu’à aujourd’hui.

La vraie force de ce roman, c’est le style très marqué de l’auteur, brut et cash, aussi prompt à retranscrire les émotions de ses personnages qu’a conférer une authenticité frappante au cadre de son récit. Je ne suis pas certaine que j’aurais adhéré à la même histoire écrite par un autre. Hyper complet, La Vallée des ombres devrait séduire les fans de roman noir élaboré dans les règles de l’art.

« Les armes m’ont toujours détraqué de l’intérieur. Elles sont comme les clés d’une porte que l’on n’ose jamais ouvrir car au bout de leur sale gueule il y a du définitif. » 

 

Xavier-Marie Bonnot, La Vallée des ombres, Belfond

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